Lors de la campagne pour l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy s'est prononcé en faveur d'une expérimentation de la TVA sociale en France.
De quoi s'agit-il ?
Traditionnellement, les services de protection sociale sont financés par les charges sociales payées par l'employeur et le salarié sur chaque salaire. Or, dans un grand nombre de pays, le niveau des cotisations est moins élevé qu'en France, où les cotisations employeurs représentent 42 % du salaire brut moyen, et les entreprises peuvent vendre leurs produits à moindre coût.
Le mécanisme de la TVA sociale consiste à basculer une partie du financement de la sécurité sociale vers la taxe sur la valeur ajoutée. Il concernerait l'ensemble des produits commercialisés sur le territoire national, y compris les produits importés, quand un prélèvement sur les salaires ne concerne que la production nationale.
Les prix de vente des produits importés n'augmenteraient pas, ce sont les marges des importateurs qui diminueraient, par la sensibilité de la demande à l'évolution des prix. Les prix de vente des produits nationaux resteront stables, la hausse de la TVA étant compensée par une baisse des prix hors taxes liée à la baisse du coût du travail et de la production. Les hausses de salaires seraient facilitées car elles n'entraîneraient plus de hausse des cotisations.
Pourquoi une TVA sociale ?
Raison morale, d'abord. Il est injuste de faire financer la protection sociale, qui profite à de nombreuses catégories de population, y compris des inactifs, au seul monde du travail par le biais des cotisations sociales.
Raison économique, ensuite. La TVA sociale est une réponse à la mondialisation. Ce transfert de charges permettrait d'alléger le coût du travail en France et de stimuler l'activité et l'emploi en renforçant la compétitivité des entreprises françaises, en concurrence avec les entreprises de pays émergents à faible coût de main-d'œuvre. Les produits que nous exportons bénéficieraient de la baisse du coût du travail en France sans pâtir de la hausse de la TVA. En outre, ce dispositif réduirait le travail dissimulé, qui échappe par nature aux services fiscaux.
La TVA a été mise en place au Danemark et, plus récemment, en Allemagne. Entre 1987 et 1989, le Danemark a progressivement relevé de trois points son taux de TVA (à 25 %) pour compenser la quasi suppression des cotisations employeurs. Ce dispositif a contribué, on le sait, au remarquable succès de l'économie danoise : baisse du taux de chômage à 5,5 %, excédent budgétaire, croissance élevée (+ 3,4 % en 2005), balance commerciale positive. En Allemagne, le taux de TVA est passé de 16 % à 19 % le 1er janvier 2007, les deux tiers des nouvelles recettes servant à combler le déficit des finances publiques et le dernier tiers à financer une baisse de 2,3 points du taux de cotisation d'assurance chômage (de 6,5 % à 4,2 % du salaire brut). Dans ces deux États membres de l'Union européenne, l'introduction de la TVA sociale n'a pas eu d'effet particulier sur l'inflation.
La TVA sociale consolidera le financement de la protection sociale et augmentera le pouvoir d'achat. En accord avec les partenaires sociaux, l'expérimentation pourrait se faire soit dans le temps, soit sur des secteurs particulièrement concurrencés par des entreprises étrangères, comme ceux produisant des biens de consommation finale, avec une forte intensité en main-d'œuvre.
Patrice Vuillard
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